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24 ASTRONOMIE-ASTROPHYSIQUE
« Artemis a fortement contribué à la théorie et la modélisation de l’instrument, et au développement d’outils d’analyse et de contrôle basés sur la simulation numérique. »
constituées des faisceaux lasers mis en phase », détaille Jean-Yves Vinet, l’un des initiateurs dès la n des années 1970 de cette extraordinaire aventure scienti que. Problème : l’appareil doit être capable de détecter des variations de distances in nitésimales entre les miroirs, de l’ordre de 10-19 mètres, soit... le dix-millième de la taille d’un proton ! Pour parvenir à ces niveaux extrêmes de précision, physiciens des
matériaux, spécialistes de l’optique, mathématiciens, astrophysiciens et ingénieurs ont
mis en commun leurs compétences pour aboutir, au terme de nombreuses recherches et développements, à la mise en service de LIGO en 1999 (puis sa version rénovée en 2015), et celle de Virgo en 2003. Au total, ce sont ainsi 1 012 chercheurs qui ont signé l’article annonçant la détection par LIGO des précieuses ondes, en septembre 2015, con rmée
en décembre de la même année par un nouvel enregistrement. Indice de la méticulosité
et de la haute technicité de l’expérience : les miroirs entre lesquels circulent en phase les faisceaux laser, d’un diamètre de 35 cm pour 20 cm d’épaisseur, sont construits dans une silice ultra pure, à l’homogénéité et l’indice de ré exion parfaitement contrôlés, puis polis avec précision. « Le miroir est réalisé au laboratoire des matériaux avancés de Lyon, en déposant des dizaines de couches de matériau sur le verre, avec une précision telle que
les pertes de lumière sont contrôlées à un niveau inférieur à 0.0001%». L’existence de ce laboratoire de Lyon constitue un vrai succès. « Dans cette collaboration, devenue au l des années internationale, Artemis a joué un rôle majeur grâce aux apports d’Alain Brillet et Jean-Yves Vinet, tous deux pères fondateurs de Virgo, l’un spécialiste de lasers et l’autre de simulation », souligne Gilles Bogaert, chercheur à Artemis. Ainsi, le système d’injection de Virgo, basé sur un laser haute puissance, est réalisé au laboratoire. « La stabilité en fréquence du laser est essentielle », explique Fabien Kéfélian, enseignant de l’Université
et membre de l’équipe. Quant à la modélisation des instruments, elle joue un rôle crucial que ce soit dans LIGO ou Virgo. Aujourd’hui c’est dans l’analyse des données qu’Artemis excelle, grâce à Tania Regimbeau (CNRS), qui est responsable de l’un des groupes dédiés
à cette activité. Car suite aux multiples contributions des uns et des autres, « nous avons décidé avec nos collègues américains que les données des trois interféromètres LIGO et Virgo seraient analysés conjointement par les membres des deux collaborations », explique Jean-Yves Vinet. Dans un futur proche, a n de détecter un nombre bien supérieur d’ondes gravitationnelles, et percer ainsi de nombreux secrets de l’Univers tels que la structure
des trous noirs ou le comportement des étoiles massives, LIGO et Virgo devront encore être amenés à leur niveaux optimaux. Puis ils seront améliorés (projets Super-LIGO et Super-Virgo), avant que, à l’horizon 2030, des détecteurs différents ne voient le jour, comme un interféromètre envoyé dans l’espace, baptisé eLISA, affranchi de l’agitation sismique terrestre, d’origine naturelle ou humaine. Ou un super-interféromètre pour ondes gravitationnelles, européen et souterrain, très justement nommé... Einstein. ◊
Référence ObservationofGravitationalWavesfromaBinaryBlackHoleMerger,Physical Review Letters, 11 février 2016.
Laboratoire Astrophysiquerelativiste,théories,expériences,métrologie,instrumentation, signaux (ARTEMIS), CNRS/OCA/UCA
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