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Le bio-polymère,
ici sous forme de précipité, est obtenu par des méthodes de chimie des matériaux.
Chercheur
Didier Gigmes, Directeur de recherche CNRS
CHIMIE 7
Chaque année en France, entre 1000 et 2000 personnes sont touchées par des lésions de la moelle épinière, pour la plupart des hommes jeunes. Parmi les causes de blessures médullaires, souvent paralysantes, les accidents sur la voie publique arrivent
en tête, suivis des chutes et des conséquences de la pratique sportive. Au total, les lésions de la moelle épinière, organe nerveux chargé de transmettre les informations entre le cerveau et le reste du corps, concernent 50 000 personnes en France, et environ 330 000 en Europe. Or, il n’existe actuellement aucun traitement ef cace pour réparer la moelle épinière. « Les quelques récupérations observées suite à la transplantation de cellules
au niveau de la lésion, ou après l’injection de molécules pharmacologiques, sont très limitées », constate Didier Gigmes, directeur de l’Institut de chimie radicalaire (ICR)
de Marseille. Pourquoi ? « Un grand nombre de cellules meurt après leur implantation,
et les molécules thérapeutiques ont beaucoup de mal à cibler le site lésionnel », précise le chercheur. Une alternative à ces stratégies consiste à implanter des biomatériaux dans la cavité lésionnelle, a n de la combler, et limiter ainsi le développement d’une cicatrice dite gliale. Produite par les cellules qui environnent les neurones, cette cicatrice protège d’une mort cellulaire en cascade les tissus sains adjacents à la lésion. Problème : « Elle empêche aussi les  bres nerveuses de repousser dans la cavité lésionnelle, même si on les aide
« Publiés en 2014, les derniers résultats montrent une récupération signi cative de la fonction locomotrice chez les animaux implantés, mise en évidence par des tests comportementaux. »
par des moyens thérapeutiques. En limitant cette cicatrice, les biomatériaux apportent un support aux axones endommagés sur lequel
ils pourraient repousser », poursuit Vincent Pertici, biologiste à l’ICR. Or, bien que de nombreux biomatériaux aient été testés sur des modèles animaux suite à des traumatismes spinaux, aucun n’a encore rempli toutes
les conditions du succès. « En particulier, il
manque aux matériaux candidats les propriétés mécaniques lui permettant d’épouser les formes de la lésion sans comprimer les tissus
nerveux épargnés, associées à des propriétés chimiques favorisant la repousse des axones, et en n une biodégradabilité dans le temps a n d’éviter à terme une calci cation », analyse Didier Gigmes.
On mesure donc l’espoir que constitue la mise au point, dans les locaux de l’ICR, d’un hydrogel dégradable répondant en grande partie à ces différentes contraintes mécaniques et biologiques. « Notre idée, née de travaux menés depuis dix ans sur le système nerveux périphérique et de notre bonne connaissance des différentes classes de polymères, a été d’associer deux d’entre eux, de nature différente, pour obtenir un copolymère présentant les caractéristiques espérées », raconte Thomas Trimaille, associé à ces travaux résolument pluridisciplinaires, puisqu’ils font appel à la chimie  ne des matériaux et à la biologie
la plus complexe.
Plus précisément, les chercheurs ont combiné, en proportion soigneusement adaptée, deux molécules appelées PLA (acide polyD,L-lactique) et PHEMA (polyméthacrylate


































































































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