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CHIMIE
d’hydroxyéthyle). L’une garantit la biodégradabilité du matériau, et l’autre lui confère son indispensable souplesse. Une fois le copolymère obtenu, et ses propriétés véri ées (cinétique de dégradation, biocompatibilité...), il a été mis en œuvre sous la forme d’un hydrogel. Ce dernier, rendu poreux pour laisser pousser les axones, pouvait en n être implanté dans une lésion médullaire.
Réalisée à l’Institut des sciences du mouvement de Marseille-Luminy avec les biologistes Patrick Decherchi et Tanguy Marqueste, cette phase expérimentale in vivo a con rmé
les espoirs placés dans le bio-implant candidat. Des rats atteints de sections de la moelle épinière, provoquées chirurgicalement, ont été traités avec l’hydrogel poreux de l’ICR.
Et les derniers résultats, publiés en 2014, montrent une récupération signi cative de la fonction locomotrice chez les animaux
implantés, mise en évidence par des tests comportementaux. Tout aussi prometteur : « Une repousse axonale conséquente a été constatée au sein de l’hydrogel. Cela signi e que les pores du matériau ont joué leur fonction de support et de facilitateur de la croissance des bres nerveuses endommagées, qui ont pu pénétrer dans les pores et y grandir, avant que le gel ne se dissolve pour laisser la place à d’autres axones », note Vincent Pertici, qui
a coordonné les expériences sur les rats. Ces résultats, très prometteurs, doivent
certes être accueillis avec une grande
prudence. « Le chemin est encore très long avant un éventuel traitement. Il faudra pour cela con rmer encore
le potentiel réparateur du biomatériau chez l’animal, avant de passer éventuellement à des essais cliniques chez l’Homme, ce qui implique d’intéresser une société pharmacologique, tempère Didier Gigmes. Pour
L’hydrogel obtenu par les chercheurs est souple et biodégradable.
..autant, toutes les pistes porteuses d’espoir méritent d’être suivies, et celle-ci en fait partie ». Et ce, d’autant que les chercheurs peuvent encore améliorer l’hydrogel candidat. « Nous espérons le rendre plus performant en mimant plus ef cacement la matrice extracellulaire, ce qui permettra aux axones en récupération d’y adhérer et se développer plus facilement », prévoit Thomas Trimaille. Autre piste poursuivie par les chimistes et biologistes : « utiliser cet hydrogel dégradable comme un dispositif d’administration pour libérer, avec une cinétique contrôlée, des molécules bioactives d’intérêt thérapeutique ». Outre son rôle espéré dans
la réparation des lésions de la moelle épinière, le matériau mis au point à Marseille pourrait être envisagé dans le traitement d’autres pathologies du système nerveux central, tels que les accidents vasculaires cérébraux ou encore la maladie d’Alzheimer. ◊
Référence «RepairoftheInjuredSpinalCordbyImplantationofaSyntheticDegradable Block Copolymer in Rat », Biomaterials, 9 mai 2014.
Laboratoire Institutdechimieradicalaire(ICR),AMU/CNRS
© Philippe Psaïla