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LES RESCAPÉS DU GONDWANA
CONCLUSION
UN PASSÉ POUR UN FUTUR
Nos travaux, engagés il y a plus de dix ans, nous ont appris, à travers la grande fragilité des éco- systèmes que nous avons investis et l’observation de la fabuleuse inventivité de la nature, l’équilibre précaire qui caractérise notre planète et l’impor- tance de la protéger pour les générations futures. Il y a une leçon, tapie au fond des forêts et accessible à ceux qui veulent l’entendre, qui nous relie à une chaîne du vivant profondément enracinée dans le temps, faite d’innombrables générations se succédant au l des ères géolo- giques, certaines espèces disparaissant et d’autres apparaissant. Voici comment nous avons perçu cette histoire et comment nous souhaitons la transmettre.
Les espèces naissent, évoluent et disparaissent. On estime ainsi que 90 % à 99 % des espèces ayant peuplé la Terre dans le passé, depuis l’ap- parition de la vie, sont aujourd’hui éteintes. L’extinction est donc un mécanisme normal de l’évolution, et même indispensable pour per- mettre la naissance de nouvelles espèces, ou la diversi cation de lignées entières. Par exemple, la naissance par vicariance de deux nouvelles espèces à partir d’une espèce ancestrale entraîne, de facto, la disparition de cette espèce ancestrale. De même, l’extinction massive de cer- taines lignées permet parfois à d’autres lignées de se diversi er. Ainsi, il est communément admis que la disparition des dinosaures a permis la diversi cation des mammifères en libérant les niches écologiques qu’ils occupaient depuis des dizaines de millions d’années.
Les espèces s’éteignent généralement par un manque d’adaptation au changement ou à des changements successifs qui se sont produits sur des périodes plus ou moins longues. Par contre, les extinctions massives n’ont souvent rien à voir
avec l’adaptation l’impact d’une météorite, le vol- canisme à grande échelle ou les grandes glacia- tions sont des catastrophes qui ont des répercus- sions planétaires et qui ont été à l’origine des cinq grandes extinctions au cours desquelles jusqu’à 90 % des espèces ont disparu. La dernière en date est celle qui s’est produite il y a 65 Ma, et qui a entraîné la disparition des dinosaures (à l’excep- tion des oiseaux). La vie a toujours repris le des- sus, et de nouvelles formes sont apparues ou se sont diversi ées à l’issue de ces extinctions massives.
L’homme, Homo sapiens, est l’une des innom- brables espèces qui peuplent la Terre. C’est aussi l’une des plus récentes, apparue il y a au moins 200 000 ans quelque part en Afrique de l’Est, ou 300 000 ans au Maghreb si l’on en croit de récentes découvertes paléo-anthropologiques. Notre espèce est souvent considérée comme celle ayant le mieux réussi, car elle a su se disper- ser sur la quasi-totalité de la surface de la planète et aussi, et peut-être surtout, parce qu’elle est la seule capable de modi er son environnement de manière signi cative.
Cependant, cette notion de réussite doit être considérablement relativisée, d’une part parce que l’homme appartient à une lignée, le genre Homo, qui n’est vraiment pas un exemple de réus- site puisque nous en sommes le dernier repré- sentant, toutes les autres espèces d’Homo ayant disparu... il y a moins de 30 000 ans pour la der- nière, Homo neandertalensis. D’autre part, Homo sapiens lui-même a bien failli disparaître à plu- sieurs reprises durant son histoire. Ainsi, une étude génétique récente suggère que les popu- lations d’Homo sapiens auraient été réduites à environ 2000 individus en Afrique il y a 70 000 ans, suite à l’éruption du volcan Toba en
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